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Critique de Joker Folie à Deux: Folie à deux francs six sous

  • Camille Goasdoué Vocanson et Lilou Gaillourdet
  • 30 oct. 2024
  • 5 min de lecture

La critique d’une déception. Nous nous attendions à un film profond et psychologique mettant en avant une romance délirante ; nous voilà face à une comédie musicale dans le style de La La Land… sans la profondeur de la romance ni la beauté de Ryan Gosling ! Pour remettre en contexte : Joker est sorti il y a cinq ans et a été immédiatement suivi d’un certain engouement. Il y a deux ans, on nous a annoncé une suite : un film centré sur la représentation du Joker et d’Harley Quinn, enfin ! Un élan d’espoir et d’impatience pour toutes et tous les fans du couple. Mais quelle désillusion au visionnage !


Joker : Folie à Deux, réalisé par Todd Phillips, reste une déception malgré la beauté non négligeable de certaines séquences.


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          Parlons tout d’abord du scénario. Ce deuxième opus débute par Arthur en prison. Les spectateurs le retrouvent dans un état second, affaibli et démoralisé. Mais, à mesure que le film avance, on voit monter en lui le retour du Joker, porté par l’amour de Harley, mais aussi par celui du peuple de Gotham. On sent une révolte gronder, en particulier pendant le procès, qui déclenche une vague de rébellion politico-sociale dans toute la ville. Cet aspect du film est particulièrement intéressant et n’est malheureusement pas approfondi. Nous nous attendions (et nous aurions aimé) à ce qu’une révolte éclate, que Joker en devienne le leader ou, du moins, qu’il devienne réellement le Joker ; mais non. Toute la tension et l’exaltation des spectateurs retombent notamment après l’explosion au tribunal qui, finalement, n’amène à rien. En parlant du tribunal, toute la partie sur le procès est infiniment longue et lassante : pas de rebondissements, pas non plus de sentiment d’excitation ni même de suspense ; cet arc du scénario est particulièrement frustrant. Cet adjectif pourrait d’ailleurs être utilisé pour qualifier notre ressenti global. De manière générale, le film est monotone ; on ne retrouve ni la folie ni la colère du Joker, comme on avait pu si bien les ressentir dans le premier. Chaque scène où quelque chose d’intéressant, de surprenant ou d’enthousiasmant pourrait se passer finit inévitablement par être décevante ou interrompue par une chanson... Certes, ce film est une comédie musicale (et on pourrait d’ailleurs largement remettre en question ce choix) ; mais certaines chansons n’apportent rien à l’histoire, voire cassent le côté dramatique et le rythme. Il y a nettement un décalage entre les deux films : dans le premier, on ressentait de l’horreur, de la peur, de l’angoisse. Il y avait un vrai côté psychologique : le spectateur était happé par la folie grandissante d’Arthur et se sentait parfois mal à l’aise. Le fait d’ajouter un aspect musical au deuxième opus est alors assez contradictoire : on perd tous les aspects du premier. Le côté psychologique est toujours présent, mais sous une autre forme : le film se penche sur les problèmes du personnage — schizophrénie ? Trouble dissociatif de l’identité ? Ces questions se posent, mais l’effet psychologique sur le spectateur, lui, n’est plus tellement présent.


         Quant aux personnages, que dire de positif, à part saluer le jeu d’acteur remarquable de Joaquin Phoenix (c’est pourquoi nous ne vous conseillons vraiment pas la VF) ? Mais impossible de parler du film sans mentionner Harley. D’un point de vue objectif, le jeu d’acteur de Lady Gaga est relativement passable ; cependant, cela reste un choix douteux. Il est impossible de nier que, depuis l’interprétation de Margot Robbie, une autre Harley Quinn est difficilement imaginable ; mais il n’en demeure pas moins que Lady Gaga ne dégage absolument pas l’énergie du personnage. D’ailleurs, aucun aspect de cette représentation ne ressemble à Harley Quinn, ni même au Dr Harleen Quinzel. C’est une femme complexe : au début sensée et investie dans sa carrière de psychologue, elle devient complètement folle du Joker. On ne voit aucunement cette évolution dans le film. Bien sûr, créer une nouvelle histoire à ce personnage iconique n’est pas inimaginable en soi ; encore aurait-il fallu qu’il y ait une vraie histoire et, surtout, que celle-ci soit crédible et approfondie. Un personnage si intéressant pour un résultat si décevant… Le film est censé être principalement centré sur son histoire d’amour avec le Joker ; nous cherchons encore l’étincelle entre les deux protagonistes. Leur soi-disant romance est fade, incohérente, bâclée ; en quelques mots : les spectateurs n’y croient pas. Pour en revenir à Arthur, l’élément central du film, il ne rattrape pas grand-chose. Tout ce que nous attendions, c’était de le voir devenir le Joker, aux côtés d’une Harley Quinn au moins aussi déjantée que lui. Finalement, on a l’impression de revenir en arrière par rapport au premier film : « hello Arthur, again… » Où est l’évolution du personnage ? Sans parler de la fin, complètement absurde, comme tout le reste de leur relation. Cela est d’autant plus frustrant que les deux personnages ont un énorme potentiel narratif, comme ont pu aisément le démontrer certaines BD (nous vous conseillons notamment Harleen de Stjepan Šejić si vous souhaitez voir une représentation digne de ce nom qui explore toute la complexité de leurs rapports). 


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          Enfin, pour finir sur une note positive, saluons tout de même le visuel du film ! Oui, il n’y a rien à dire, le film est beau. Les plans, le choix de la colorimétrie, des lumières : esthétiquement parlant, on aime. Nous voudrions notamment mentionner deux scènes qui nous ont marqués. La première est une scène dans la prison. Lorsque Arthur est dans sa cellule, les murs reconfigurent l’espace du cadre, ne laissant au personnage qu’un tout petit carré de lumière pour exister. Nous avons aussi beaucoup aimé la scène du parloir avec Harley Quinn. Cette dernière rend visite à Arthur pour le convaincre de changer de stratégie et d’assumer pleinement son identité de Joker. Arthur est net au second plan, puis la protagoniste dessine un sourire au rouge à lèvres sur la vitre du parloir, et le focus se fait alors sur sa main. Lorsque Harley recule en disant « I want to see the real you », le point net revient sur Arthur, avec un léger mouvement de caméra accompagnant celui d’Arthur, qui place son visage de telle façon que le sourire dessiné par Harley arrive au niveau de sa bouche. Puis il sourit, et cela s’adapte parfaitement à l’arc de cercle rouge sur la vitre. Cette scène est présente dans le teaser officiel et promettait déjà, à elle seule, de beaux plans.


          Pour conclure, la bande-annonce promettait beaucoup d’action et une romance exaltante ; mais, comme nous l’avons mentionné à plusieurs reprises, le résultat est loin d’être celui que l’on attendait.



Camille Goasdoué Vocanson et Lilou Gaillourdet 


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