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Oh, canada : Le grand rendez-vous manqué de 2024

  • Arsène Falampin
  • 14 févr.
  • 3 min de lecture

Oh, Canada, le nouveau film de Paul Schrader, sorti en décembre dernier, est l’adaptation du livre éponyme de l’auteur Russell Banks. Et c'est, vingt-quatre ans après le grand succès critique et publique d’American Gigolo, que Richard Gere se retrouve de nouveau face à l’objectif du cinéaste américain, aux côtés d’Uma Thurman, Jacob Elordi et Michael Imperioli. À travers ce court film d’une heure et demie, Paul Schrader met en scène la fin de vie d’un documentariste renommé, Leonard Fife, interprété par Richard Gere. Lors de ses derniers jours, il accepte d’accorder un ultime entretien, sous les yeux de sa femme (Uma Thurman), dans le but de lui avouer les chapitres secrets et inavouée de sa vie. Présenté en Compétition officielle au Festival de Cannes en été 2024, boudé par une grande partie des critiques, le film ne figure malheureusement pas au palmarès Cannois. 



Comme à son habitude, le cinéaste originaire du Michigan, s’intéresse aux parcours de rédemption de ses personnages. Ici, contrairement à ses précèdents films, Paul Schrader dépeint le portrait d’un homme rongé par ses remorts, ayant refoulé son passage initiatique. Le film évoque le passage du temps et les regrets qui en découlent. Pour évoquer cela, le film a l’intelligence de ne pas tomber dans le pathos et la facilité, n’essayant jamais de nous arracher des larmes par la mort annoncée du personnage. Au contraire, il évite également de le rendre détestable, nous confrontant ainsi au portrait d’un homme nuancé, ni trop bon pour être aimé et ni trop mauvais pour être détesté. 


C’est aussi par le montage et la construction du scénario, que la justesse du récit prend forme. Paul Schrader nous livre une expérience de mort imminente. Celle-ci, prend forme à travers les paroles du personnage, où fantasmes s’incorporent aux souvenirs et où ses témoignages se perdent et se juxtaposent.


Parmi les qualités formelles du film, il convient de mettre en lumière la réalisation de Paul Schrader. Minimaliste et intimiste, porté par la photographie d’Andrew Wonder, elle nous transporte à travers les souvenirs de cet homme et nous ramène au cœur des années soixante. Plus flagrant que sa mise en scène, le film nous transporte par le jeu de ses acteurs, notamment par la performance de Richard Gere mentionnée par toutes et tous, mais aussi celle, moins remarquée mais tout aussi bouleversante, d’Uma Thurman. 


De plus, à travers son iconographie, le film établit un parallèle avec American Gigolo. Comme mentionné précédemment, Oh, Canada signe les retrouvailles artistiques entre Paul Schrader et Richard Gere. Dans ce film, le cinéaste américain invoque de nouveau la figure culte de l’acteur connu de tous, pour en dévoiler ici le contre-champ, transformant le « sex symbol » du début des années 80, en une figure vieillissante, abîmée par le passage du temps et par la maladie.


À travers un film riche et poétique, Paul Schrader nous délivre son regard sur la mort, influencé par ses propres problèmes de santé qui, lors du tournage de son précédent film Master Gardener, l’avaient contraint à être hospitalisé d’urgence. Cette épreuve l’a ensuite poussé à se lancer précipitamment dans la production de ce film, avant qu’il ne soit trop tard. Cette urgence fait écho à celle de son personnage, contraint d’avouer l’inavouable face à la caméra. Oh Canada est une œuvre majeure, accompagnée par les paroles pleines de mélancolie de C’est la vie No.2 de Phosphorescent, qui sublime la beauté des décors et de ses paysages montagneux à la frontière du territoire Canadien. 


Malheureusement boudé, comme à son habitude par une grande partie des critiques au Festival de Cannes, et suivi d’une sortie anonyme en France et dans le reste du monde. Oh, Canada, s’impose comme l’un des plus beaux films de Paul Schrader, rejoignant le panthéon des plus grandes œuvres de 2024.


Arsène Falampin


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